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Août 2006, Karatsu, Japon.
Karatsu, située sur la partie nord de l’île de Kyushu dans la préfecture de Saga est une petite ville perdue entre mer et montagnes. Un endroit ou le temps semble s’être arrêté. Il y a beaucoup d’endroits comme celui-la au Japon.
Arrivée par le train, une heure de trajet depuis Fukuoka, échappée de Tokyo l’espace de quelques jours, je suis venue découvrir les fameuses poteries.
Les bols dont on se sert pour boire le thé ont conservé l’emprunte des maîtres potiers coréens. Sur une terre rose ou jaune quelques brins d’herbes ploient sous la force du vent. Vague évocation de la vie des hommes, pauvres herbes du chemin que nous sommes.
Au fil du temps le bol se transforme, et dans les ateliers et les magasins on peut voir la différence entre l’ancien et le nouveau. Au Japon l’objet s’enrichie de la patine du temps. Bien vieillir est l’une des qualités de cette céramique. Si les hommes ont l’obsession du travail bien fait ce n’est pas que le produit soit fait pour durer toujours mais plutôt pour bien vieillir.
Bol ayant servi.
Bol neuf.
Exemples de terre jaune et rose.
Du château édifié en 1608 en bord de mer il reste un donjon d’où l’on aperçoit une ville entre eau et montagnes, une plage bordée de pins qui s’étend sur des kilomètres, des îles qui ressemblent à des montagnes.
Ce matin dans un atelier, pour la première fois, je me suis essayée à faire un bol. L’affaire a duré plusieurs heures. Cette terre entre mes doigts il fallait absolument en faire quelque chose et mes mains de s’activer, heureuses de ce contact.
Voici le bol reçu quelques semaines après à Tokyo.
Longue marche ensuite le long de la plage à partir de Niji no Matsubara. Des kilomètres de pins et de plage.
Retour à l’auberge, après la douche et le bain, assise sur les tatamis, sur la table devant moi la servante vient de porter le thé, à l’intérieur il fait bon. Au dehors il y a la chaleur de l’été et le cri strident des insectes.
On découvre la terre en même temps que l’on découvre ce dont les doigts sont capables. Alors que l’on ne possède encore aucune technique, chaque mouvement compte, la concentration est intense, en un instant, à tout moment on peut tout gâcher. La terre est molle, elle peut s’affaisser, se déformer, il faut lui donner forme. Les doigts découvrent et sculptent, petit à petit le geste se révèle instinctif.